Semaine 2 du confinement : le tiers-monde.

Vous l’aurez compris, je me suis questionnée en « semaine 1 » et j’ai remercié tous ces gens formidables qui facilitent notre profession au quotidien en temps de pandémie … En semaine 2, je ne peux que constater la situation éprouvante dans laquelle nous sommes, avec beaucoup d’humour …

Je constate que les problèmes de com’ ne sont pas réglés au sein de l’éxécutif, et même s’aggravent, avec cette phrase de notre cher ministre de la santé, que je tiens à remercier tout particulièrement : « Ce n’est pas le manque de masques qui infecte les soignants, mais leur proches » M. Véran.

Dans ma voiture, masque depuis 10h sur le nez et la bouche m’empêchant de reprendre mon souffle, je suffoque, et mon cerveau se fige … Ai-je bien entendu ? Ou suis je tout bonnement en EEG plat ?

Donc, pas de remise en question … Pire : on rejette la faute sur les proches … ces virus ambulants, source de pandémie Coco … La blague est bonne … Digne d’une Florence Foresti à l’apogée de son art … Peut être faudrait il changer de carrière ? L’école des clowns ?

Du coup, certains IDEL migrent en dehors de leur foyer … Par contre : pour ne pas contaminer leurs proches et pas l’inverse parce que nous avons fait des études, nous, monsieur. Je ne sais pas qui lui a suggéré de dire une telle énormité, ça me paraît inconcevable, les mots me manquent, et pourtant je suis bavarde … Me Sibeth Ndiaye a dit « Pff franchement tout devient polémique, c’est pénible » …

C’est ma préférée …

Je te jure… ouais : C’EST PENIBLE.

Mais aussi les IDE doivent partir, car de jolis mots fleurissent sur les pares brises et dans les cages d’escaliers leur proposant d’aller voir ailleurs si on y est … Bientôt, nous devrons porter notre croix sur le torse … Attention à vous : ON EST NOMBREUX, vous risqueriez d’être étonnés … Somme toutes, je ne ferai pas de rapprochement malsain, mais il est possible qu’à la fin, certains aient l’idée saugrenue de tous nous parquer au même endroit pour que l’on cuve notre COVID.

J’en ai fait mon expérience au supermarché, ma nouvelle tenue étant de porter mon caducée autour du coup (au cas où on me le vole, je suis comme une vampe, je vois le mal partout) : tout le monde s’écarte dans les rayons : bah j’ai la paix …

Mise à part cela, les choses s’organisent pour les IDEL, sans leurs tutelles qui font les comiques et des écoles de cirque … Les posts FB fleurissent, les regroupements de quartiers, CPTS, groupes WHATSAPP, afin de récupérer et acheter le matériel qui nous manque tant – qui ne tombera malheureusement pas du ciel ; et faire des KIT COVID, auprès d’associations, garagistes, entreprises alimentaires … Oui, car pour aller faire des soins de ville aux patients COVID+, on nous recommande : masques, charlottes, lunettes, surchaussures, surblouses déperlantes, matériel de désinfection, matériel d’élimination … Et tout cela pour une visite auprès du patient côtée AMI5,8 soit 18,27 euros BRUT … Soit 9 euros net … Je vous le dis, on fait dans l’éclat de rire bruyant, à s’en tordre le bide … !

Les centres COVID+ aussi s’organisent … Seul problème, il faudrait que les IDEL rémunèrent les bénévoles. Avec des contrats de collaboration et d’entraide.

Ok … Des bénévoles (ça veut dire qu’ils s’engagent sans être payés normalement, non ?), payés par des IDEL sur leurs propres deniers, qui deviennent donc CIO de PME en temps de pandémie … C’est assez rigolo aussi … Je n’ai pas suivi la fin de ces interrogations/malversations, j’ai préféré me retirer de ce groupe WHATSAPP qui me paraissait bien engagé dans le : n’importe quoi en temps de crise, allons y gaiement …

Alors voilà, la vague est là, les services de réa + les services transformés en réa + les services spécialisés : on compte les décès à l’hôpital à coup de beaux graphiques, et on se garde bien de les compter dans les EHPAD et en ville, mais on en parle en disant : « Ils sont pas comptés » on sait pas à quoi ça sert, mais on le dit sans faire de jolies courbes. On pourrait dire aussi que dans les établissements IME, psychiatriques et j’en passe … On ne les envoie pas non plus à l’hôpital, on les met dans une salle commune, ensemble (les suspects COVID) et on regarde ce qui se passe, comme pour une petite expérience Pavlov (Vont il tous mourir en même temps !? Question : 2 minutes, Mr Lepers Que suis je, je suis je suis) … Car on ne teste plus : bah oui, pourquoi faire ? Toujours trop d’ « humour » …

Nos collègues hospitaliers de Mulhouse criaient derrière notre cher Président lors de son intervention mi-hebdomadaire devant son bel hôpital militaire, masque FFP2 sur le nez (on nous a pas dit qu’il ne fallait le mettre qu’en cas de sécrétions et en présence d’un patient COVID ? Je constate c’est tout … C’est pas une critique, tout de suite ! ) mais les scènes ont été coupées au montage, ça faisait tâche ces soignants qui réclament des moyens et de l’écoute … On dirait des zombies en plus … C’est pas le moment de se révolter , on vous a dit : « Vous êtes des héros, on vous remercie, puis en plus on vous applaudit tous les soirs, que voulez vous de plus ? Qu’on filme votre détresse ? Voyons … »

Euh ?

Bah rien…

En parlant de masques, la pharmacienne m’a appris en milieu de semaine 2 que les 18 précédents avaient été délivrés pour 15 jours.

Ah ?

Quelle bonne nouvelle … J’en ai rêvé pendant trois jours … Vous savez : ce sommeil entrecoupé de cauchemars … Pour des masques, des blouses et nos patients très isolés, on se demande juste comment va finir tout cela ? Mal …

Voilà, semaine 2, je me dis qu’en terme de « pays développé » on est plutôt à la ramasse, car au moins dans les endroits du tiers monde, ils ont l’HUMILITE de dire qu’ils n’ont rien…

Nous, on se fait mousser, on se trémousse & on se mousse …

PS : les choix draconiens qui se présente tous les jours, par exemple :

  • 40 ou 60 ans. réponse = 40 ans ;
  • AVP récupéré par SAMU et intubé sur place ou pneumopathie COVID neg intubé à domicile = choix => peut être aucun des deux car oui = y a plus de place en réa …

Elle est belle la France … Et on laisse ce choix aux soignants, car ils sont GRANDS … Ils pourront l’avoir sur la conscience, eux, c’est pas grave, ils boufferont de la chloroquine par le nez pour oublier …

 

2 réponses sur “Semaine 2 du confinement : le tiers-monde.”

  1. Super analyse réaliste de ce que l’on vit et pensons chaque jour.
    Merci beaucoup pour cette verve solidaire de notre situation d’IDE liberale.
    Ce message m’a émue car il exprime tout mon désarroi face à cette crise…. et dans mon secteur nous sommes dans l’attente….nous nous préparons pour ce tsunami. … qui reste à la porte pour l’instant… nous vivons en décalage avec nos confrères submergés. ….presque coupables de notre « passivite ». Nous assurons nos soins quotidiens en priant ne pas contaminer. ……

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